Terrain de jeu de nombreux Québécois, le fleuve Saint-Laurent cache aussi son lot de dangers. Les résidents de l’île Sainte-Thérèse portent secours régulièrement à des plaisanciers en bateau, kayak, canot et planche. Ils le font sans tambour, ni trompette. Discrètement. Les malheureux qui s’égarent dans ces eaux parfois troubles leur doivent souvent leur vie. Nous vous racontons aujourd’hui les aventures d’un de ces gardiens de l’île : Louis Bélanger.
Louis Bélanger fréquente l’île Sainte-Thérèse depuis son plus jeune âge. Arrière-petit-fils d'un marin marchand et fils d'un guide sur le fleuve, Louis est né sur le bord du Saint-Laurent. Dès l’âge de sept ou huit ans, il commença à s’aventurer sur ses eaux agitées. Bien qu’en semaine il y allait à la rame, en fin de semaine il lui était permis de prendre le petit moteur 5 forces puisque son père l’avait à l’œil.

Aujourd’hui pompier retraité de la ville de Montréal, Louis est toujours aussi passionné du fleuve. Il est très expérimenté en navigation. Si vous êtes mal pris, espérez être sur le chemin de Louis! Bon samaritain, Louis a effectué maintes opérations de sauvetage.
Quelques anecdotes
Monsieur et madame Tout-le-Monde peuvent louer des embarcations à rame au Parc des Îles de Boucherville. Certains d’entre eux s’aventurent dans les eaux du fleuve là où est le chenal, soit parce qu’ils sont téméraires ou soit parce qu’ils sont mal informés du danger que cela représente.
Un jour, Louis et ses fils, Bruno et Jean-François, ont secouru deux planchistes qui étaient perdus parce qu’ils regardaient leur carte à l’envers. Ils les ont trouvés du côté nord de l'île Dufault, ramant à sens contraire à la noirceur. Ils les ont ramenés au centre de location de l'île Ste-Marguerite.
Il y avait aussi la fois où un couple et deux jeunes enfants en canot n’arrivaient plus à ramer contre le courant, vu les forts vents. Leur manque d’expérience aurait pu leur coûter cher. Louis les a tous embarqués dans sa chaloupe - y compris le canot. Il a ramené la petite famille à bon port, au grand bonheur de tous.
Vous connaissez les battures Taillandier? Non? Vous n’êtes pas seuls à ignorer leur existence. Un jour, Louis a porté secours à un couple en kayak. Ils étaient perdus et désorientés.
Porter secours à ceux qui portent secours
Les exploits de Louis ne s’arrêtent pas à des petites embarcations! Au début des années 2000, Louis a remorqué la brigade nautique du poste 38 de l'île Ste-Thérèse jusqu’à la rampe de mise à l’eau de Pointe-aux-Trembles. Ayant une mauvaise connaissance des lieux de passage, leur moteur avait surchauffé lors d’un passage dans les algues.
Une autre fois, en revenant de la pêche avec son fils Jean-François et un voisin, Louis vit les garde-côtes qui tentaient de dépanner un plaisancier sur le bord de l'île Ste-Thérèse en face de Pointe-aux-Trembles. L’opération ne semblait pas bien se dérouler; le bateau de la garde s’était échoué. Un pompier hors service de Repentigny avait tenté de venir en aide en tirant le bateau de la garde. Malheureusement, le bateau avait coulé, résultat d’une fausse manœuvre. Pour sa part, le pompier, qui avait stoppé son moteur, s’était échoué lui aussi. Louis à la rescousse! Après avoir ramené le plaisancier à la rampe de mise à l’eau, il est retourné sur les lieux. Entre-temps, un deuxième bateau de la garde côtière était arrivé sur les lieux avec deux agentes à bord. Louis a proposé d’apporter les câbles jusqu’au bateau du pompier; une agente a pris place dans sa chaloupe. Son fils, Jean-François, a sauté à l’eau et a réussi à attacher le bateau du pompier. L’histoire s’est donc bien terminée avec tout le monde sain et sauf sur la terre ferme.
Secours l’hiver
Louis a souvent répondu à l'appel des garde-côtes et des pompiers du poste 38 l’hiver, lorsque des bateaux partent à la dérive, y compris la fois où un homme et son chien sont restés pris sur l'île à la Truie. Ils étaient tous deux soulagés de le voir arriver en chaloupe!
Pas toujours joyeux
Louis a trouvé des noyés à quelques reprises. Il a même déjà porté assistance à un jeune policier qui n’était pas à l’aise de rester seul en attendant l’arrivée du coroner. De tels tristes incidents marquent à jamais les résidents de l’île.
Gardiens, de génération en génération
Nous n’aurions pas assez d’un livre pour raconter toutes les fois où Louis a aidé des gens sur le fleuve Saint-Laurent. Heureusement pour les plaisanciers, cette tradition de bon samaritain se poursuit : cet été, son fils Jean-François et son neveu, Jonatan, ont porté secours à un homme dont le canot avait chaviré. Le pauvre était gelé, sans gilet de sauvetage, à la dérive et se dirigeait vers le chenal des navires. Heureusement pour lui, Jonatan et Jean-François étaient de passage et ont pu lui venir en aide.
Lorsque les résidents de l'île Sainte-Thérèse peuvent secourir des plaisanciers qui se retrouvent dans des situations fâcheuses, ils n’hésitent pas. Ils considèrent cela un devoir de bon citoyen. Cet esprit de communauté et d'entraide caractérise la philosophie de vie des résidents de l’île. Ils sont de vrais gardiens de l’île Sainte-Thérèse et de son fleuve.
Pour mieux apprécier le fleuve et son chenal, consultez ce billet de l’historien Jacques Provencher, qui cite un article publié dans le journal Le Soleil en 1908. A l'époque, les résidents de l’île Sainte-Thérèse y habitaient depuis près de 250 ans.
- Fannie Martin, Présidente de l'ACIST
Vous avez apprécié cette capsule historique? Ce billet pourrait également vous intéresser : Souvenirs d'enfance : la famille Lépine